Saïd Taghmaoui,
l’âge de raison…
Propos recueillis par Agathe Turquois
Depuis « La haine » de Mathieu Kassovitz,
il s’en est passé du temps et des tournages pour Saïd Taghmaoui qui n’a cessé de
gravir les marches du septième art, se faisant un nom dans les plus hautes
sphères du cinéma international, jusqu’à s’ouvrir les portes de Hollywood. Mais
le subtil comédien qu’il est, ne se lance pas pour autant dans un rôle à légère.
Pour lui, il est indispensable de se positionner de par ses choix. D’abord à
l’aide de la boxe, puis au travers du cinéma, Saïd a appris à canaliser son
énergie débordante. Hyperactif, il croit aux vertus de la respiration, et c’est
bien là, la qualité fondamentale d’un comédien : Savoir respirer un texte, c’est
lui donner vie ! Plus qu’une passion, le cinéma est pour lui une rédemption. De
lectures en lectures, l’acteur n’a eu de cesse d’apprendre et de se cultiver,
jusqu’à devenir l’érudit qu’il est dans de vastes domaines. Car pour Saïd
Taghmaoui : « le drame de l’humanité ça n’est pas la misère, mais bien
l’ignorance ». Présent à Marrakech dans le cadre du tournage de l’émission « Une
nuit à Marrakech », élégamment vêtu d’un costume cravate, le bel éphèbe au
regard ténébreux présentait aux côtés de Patrick Bruel « Ô Jérusalem », un film
initiatique, comme il les aime… A 33 ans, Saïd Taghmaoui est arrivé à maturité,
alors il ne lui reste plus qu’à rencontrer élue de son cœur, pour mettre en
œuvre ses projets de famille -qu’il souhaite nombreuse- aux reflets de la sienne
qu’il compare à l’arc en ciel. Parce que l’amour, avec tout ce qu’il comporte de
complicité et de complexité, se partage en plusieurs périodes, plusieurs
couleurs, comme la palette d’un peintre ou celle d’un arc en ciel… S’il a tourné
aux côtés de femmes merveilleuses comme Angelina Jolie, Kate Winslet et Charlize
Théron -qu’il trouve diaboliquement belle de par sa pudeur et sa force- Saïd
aime les femmes dignes, courageuses et combattantes : Des qualités qui lui
ressemble…
A.T. : Vous avez tourné plusieurs fois au
Maroc, notamment pour Ali Zaoua de Nabil Ayouch mais aussi Marrakech Express
-la sublime adaptation du livre d’Esther Freud- puis plus récemment, celle du
roman de Mohamed Choukri, Le pain nu sorti en avant première l’été
dernier, pendant le Festival de Casablanca… Que s’est-il passé pour vous
depuis ?
S.T. : J’essaie de mettre du beurre et de
confiture sur le pain… (Rires) Trêve de plaisanterie… Ce soir, avec
Patrick Bruel, nous sommes venus présenter « Ô Jérusalem », le dernier film d’Elie
Chouraqui. Un film sur la paix, dont la sortie est prévue en octobre prochain.
L’histoire -adaptée d’un livre de Lapierre et Collins qui s’est vendu à plus de
30 millions d’exemplaires- relate ce qui s’est passé en 1948, lors de la
bataille de Jérusalem, quand les anglais quittaient la Palestine. Un film
charter, porteur de messages essentiels.
A.T. : Depuis plusieurs semaines, vous
présentez « Cinéma du monde » sur Canal + cinéma, de quoi s’agit-il ?
S.T. : C’est une émission sur le cinéma
international. Un samedi sur deux, nous projetons un film d’auteur parmi les
meilleurs. Il s’agit de films inédits à la télévision, d’œuvres récompensées
lors de grands prix mais qui n’ont pas automatiquement reçu l’engouement du
public. Des films à redécouvrir, réalisés par de grands cinéastes… Des perles
venues d’Asie, d’Amérique du Nord, d’Europe…
A.T : C’est la première fois que vous
présentez une émission télévisée…
Oui, c’est ma première expérience en tant que
présentateur, mais dans un registre qui m’est propre. Et je m’éclate parce que
je découvre plein de trucs. Cela m’oblige à revoir les films, à les étudier…
J’apprends à écrire la critique, à présenter l’émission… C’est une école, et
c’est aussi une façon de rendre au cinéma ce qu’il m’a apporté. Le fait même de
relativiser ses propres convictions, c’est fascinant, cela amène tellement de
choses.
A.T. : Vous n’aimez pas parler de palmarès
et pour vous, comme pour Jean Cocteau : « les prix c’est comme les punitions,
quand on en reçoit, c’est que l’on s’est fait trop voir »… Pourtant, vous venez
de recevoir un trophée remarquable…
S.T. : Oui, en Egypte, j’ai gagné un prix
extraordinaire : « La Pyramide d’or ». Celui de meilleur acteur arabe, remis des
mains d’Omar Sharif pendant le Festival du Caire. J’étais très ému.
A.T. : Où en êtes-vous de la campagne de
prévention routière que vous avez entamée l’année dernière au Maroc ?
La campagne continue… Avec le Centre National
de Prévention des Accidents de la Route, sous la jonction du ministre des
transports et de l’équipement, Karim Gellab, nous venons de réaliser un spot
pour fêter le premier anniversaire de la campagne et pérenniser notre
engagement. On s’investit toujours autant, mais on commence à entrevoir des
résultats sur les routes. Les gens font plus attention, concernant la ceinture,
le casque… On commence à parler de permis à points et plusieurs mesures sont en
train d’être mises en place.
A.T. : Quels sont vos projets à venir ?
S.T. : Je vais démarrer le tournage d’un film
avec Canal +, sur le terrible thème du Jihad. Un projet très intéressant
de par la façon dont il aborde le sujet. Et ça me fait très plaisir car il
s’agit encore d’un thème qui me tient à cœur. Le film essaie d’apporter un peu
de lumière sur le processus d’endoctrinement. Pour essayer de comprendre
surtout, même si ça ne veut pas dire accepter. Félix Olivier, le réalisateur de
« Last Night Bodega » est issu du documentaire. Il témoigne d’une véritable
volonté d’aller au plus profond du réalisme.
|